Deux filles à la dérive

Publié le par yokai

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Dernier film de Patrick Grandperret, “Meurtrières” est une adaptation d’un fait divers survenu à la fin des années 1970: deux adolescentes tuent un homme à Chalon-sur-Saône et, mal défendues par un avocat commis d’office, elles écoppent d’une condamnation à perpétuité.

Avec un budget serré, et une fiction influencée par le regard de Maurice Pialat (qui fut le premier à vouloir l’adapter), Grandperret donne une réponse à la terrible et banale question : comment en sont-elles arrivées là? Que leur est-il arrivé?…

Premières images du film: un premier personnage féminin, un masque de stupeur sur le visage et du sang sur les vêtements va où le conduisent ses pas. Les voitures rares passent indifférentes dans les rues baignées d’une lumière rouge. Elle attérit chez une dame compatissante qui se propose de la secourir. Au bout d’un court instant, entre en scène un deuxième personnage féminin, aux abois, ensanglanté, la main tenant un couteau. Une phrase courte, brutale et lourde de sous-entendus tombe : “faut qu’on s’casse”.

C’est l’histoire de Nina (Céline Sallette) et de Lizzy (Hande Kodja), deux adolescentes à fleur de peau, trop pessimistes pour leur âge, pleines de rêves malgré tout, qui regardent le monde des adultes avec envie ou mépris… Elles se rencontrent dans un hôpital psychiatrique, se reconnaissent et deviennent amies de mauvaise fortune. Elles développent rapidement une relation fusionnelle à la fois destructrice et rassurante qui les protège des assauts hypocrites et lâches du monde extérieur, celui des hommes en particulier.

La vie semble leur avoir tourné le dos: définitivement seules, elles ne peuvent compter sur personne, ne possèdent rien… Ensembles, elles vont traîner de ville en ville leur misère affective, leur faim et leur soif d’une vie ordinaire qui se refuse à elles et enchaînent les plans “galère” jusqu’au drame.

Pas de misérabilisme chez Patrick Grandperret, juste une peinture froide de deux existences qui semblent n’avoir servi à rien, comme deux accidents de la Vie, deux oubliées de Dame Fortune.

C’est un film dur, dont la scène finale est ambiguë tant au niveau symbolique que visuel. Les amateurs de drame psychologique et de peinture sociale sans rêve américain apprécieront aussi -je le suppose- la mise en scène très “minimaliste”… Enfin, l’interprétation de ces deux toutes jeunes actrices est remarquablement juste.

Pour des infos sur le film, encore distribué dans deux salles à Paris, allez voir:
Résumé et Bandes annonces… de “Meurtrières”

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Publié dans CINOCHE

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