Au bonheur des Vieilles

Publié le par yokai

Goya Vieilles.jpg Qui n’a pas rêvé l’espace d’un instant non charitable d’écraser une de ces dignes représentantes du vieil âge ingrat sous les roues malhabiles de son solex? Qui n’a pas rêver de perpétrer ces petits meurtres entre amis, sur ces clones de Tati Danielle, façon remake de « C’est arrivé près de chez vous »?

La croisade contre les phénomènes les plus répandus sur terre et les moins médiatisés, à part peut-être dans Groland, à savoir le vieillissement prématuré de la population, la mode des charentaises à talons aiguilles, des caddies couleur papier chiotte, des manteaux en fausse hermine à carreaux… a sans-doûte commencé.

Non que je n’apprécie pas les “seniors”, ça y est je l’ai dit, mais avouez comme la vie serait certainement plus agréable si on n’avait pas à céder sa place dans le bus à une vieille acariâtre, affublée de son traditionnel sac en véritables poils de caniches nains, sous le prétexte fallacieux que finalement les chaussures Scholl, c’est plus confortable quand on est assis, les sournoises !

Tout de même, où est passée la jeunesse hippie frivole, aux dents d’acier et à la politesse en forfait faible débit qui faisait frémir la mémé, le menton rasé de près qu’on entendait répéter comme un mantra : « ah, la jeunesse de mon temps, ah la jeunesse de mon temps, …. ».

Mais, la vieillesse n’est ni une maladie qu’on porte honteusement sur le dos ni une excuse banale pour gagner du temps dans la queue à La poste ou une place dans le bus de la RATP. Ce n’est pas non plus une maladie incurable, qu’on vous inocule passé la soixantaine…quoique?!

En même temps, regardez comme ces fières à dentiers amovibles et à chevelures roses vaporeuses nous donnent l’exemple. Ayant pour beaucoups travaillé toute leur vie, en endurant parfois les pires conditions de travail, elles se font dorer la pilule au soleil des hospices, balader dans des bus roulant au colza et bénéficient de cures d’amaigrissement avec les bons remerciements de fabricants de compotes de pruneaux. Un vrai paradis.

On comprend alors peut-être mieux cette hargne qu’ont certaines à faire valoir leur droit à la vie sur les autres, à eux les biens portants, qui ont encore le choix de leur alimentation et peuvent encore oser porter des tenues bigarrées sans passer pour des tantouses sur le retour ! (Il faut dire que le vert-de-gris c’est mieux porté par un vieux.) On imagine bien comment la « pilule-ectasy near the death » paraît amère quand on vous fait sentir, chère Mamie, que vous sentez déjà… la mort. Mais surtout qu’après y avoir laissé votre jeunesse et vos idéaux, la société vous jette comme un kleenex. Aux biens portants, encore eux ces ingrats ! de payer la note et supporter le cadeau empoisonné.

Aujourd’hui, il semblerait qu’elles représentent un marché à conquérir : enfin la société dans sa grande humanité s’est aperçue qu’il restait encore à becter sur le dos courbé de ces frêles créatures. Comme l’antichambre de fin de vie devient cosy tout à coup.

Ainsi, hypocritement chouchoutées, les vieilles abandonnent leurs petites économies et sauvegardent jalousement, fausses dents et ongles aiguisés, leurs précieux secrets de l’existence. Et, au bout du compte, on peut toujours l’attendre cette fameuse sagesse des anciens qui n’est finalement qu’une vaste connerie. Désormais, c’est chacun pour sa tronche, c’est la loi du chignon.

En tout cas, il me semble qu’en Art, seul le message compte, l’âge n’est important que pour l’Etat Civil. Et, une vieille femme ratatinée peut être aussi intéressante qu’une jeune femme plantureuse. Voyez Goya…
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Publié dans GROSSES COLERES

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